Télétravail : comment revenir au juste équilibre
Après une généralisation à marche forcée durant la crise sanitaire, le travail hybride semble aujourd’hui victime d’un retour de balancier de même ampleur. Cette tendance, venue des États-Unis, pourrait bientôt nous concerner. Il est donc urgent de s’y préparer, en recherchant une voie médiane entre le « tout télétravail » et le « tout présentiel ».
C’est sans doute l’exemple le plus emblématique des témoignages d’entreprises qui pullulent dans la presse américaine : Zoom, qui offre des outils de visioconférence et de collaboration à distance, demande désormais à ses salariés deux jours de travail hebdomadaire au bureau ! Plusieurs banques, comme JP Morgan, ont par ailleurs décidé de bannir le télétravail pour les managers. La liste ne cesse de s’allonger, concernant tous les secteurs d’activité.
Ce retour en arrière, dont on ne connaît pas encore l’impact sur l’attractivité des entreprises, risque fort, comme toute tendance RH, de s’inviter prochainement dans nos organisations. Or, d’après une estimation du moteur de recherche d’emploi Indeed, près d’une entreprise française sur 10 mentionne le télétravail dans ses offres d’emploi, soit cinq fois plus qu’en 2019. En parallèle, l’usage de mots clés en rapport avec le télétravail dans les recherches d’emploi reste très marginal. Pour les experts d’Indeed, une explication s’impose : le télétravail est en train de devenir une normalité à laquelle les candidats s’attendent.
Analyser l’existant et identifier des axes de progrès
On voit le chemin parcouru en France, pays marqué par une forte culture du présentéisme. Manque de confiance managériale, doutes sur la productivité en télétravail… Les freins potentiels sont nombreux ! D’autres arguments sont avancés par les réfractaires : « surdosé », le télétravail aurait des conséquences négatives sur la santé mentale des collaborateurs, mais aussi sur la cohésion du collectif de travail.
Il ne s’agit bien sûr pas d’évacuer ces risques, mais de les objectiver. C’est sans doute l’un des axes de travail que les entreprises françaises auraient intérêt à privilégier, dans le cadre d’une mise à plat globale sur le télétravail tel que pratiqué au sein de l’organisation. Une mise à plat et une redéfinition des règles du jeu, qui passent par trois étapes complémentaires :
- Une analyse de l’organisation du travail et de l’articulation présentiel/distanciel
La première phase consiste en une enquête approfondie, auprès des collaborateurs et de leurs managers ; il va s’agir de mettre en évidence les perceptions, le ressenti, les retours d’expérience de chaque salarié, avant d’établir des analyses fines – par business unit, par fonction, etc. L’objectif étant de disposer d’une vision à la fois macro et micro, pour définir un nouveau cadre qui tienne compte de ces retours, dont ceux des managers sur la performance de l’équipe, son niveau d’engagement…
- Une prise en compte accrue des impacts négatifs du télétravail
D’après différentes enquêtes, plusieurs points de vigilance sont à prendre en compte avec le télétravail ; en particulier, l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, du fait de frontières de plus en plus poreuses entre ces différents temps de vie ; mais aussi le droit à la déconnexion et la fatigue digitale, une nouvelle forme de souffrance au travail à laquelle il faut prêter attention. Régulièrement, des points doivent être réalisés, au niveau de l’organisation comme de chaque collectif de travail, pour identifier les éventuelles difficultés et les résoudre avant qu’elles ne prennent trop d’ampleur.
- Une expérience collaborateur renouvelée en présentiel
Les entreprises devraient s’interroger sur ce qu’elles apportent « en plus » aux salariés quand ils sont au bureau. D’après une étude de l’éditeur de technologies collaboratives Owl Labs, auprès de 2 000 collaborateurs, 61 % des personnes interrogées estime que leur employeur exige le présentiel à cause d’une vision traditionnelle du travail. En outre, les organisations qui n’intègrent pas efficacement le travail hybride dans leur espace de travail sont perçues comme vieillissantes et en manque d’innovation managériale. Bref, il est essentiel d’apporter une plus-value, par exemple en instaurant de nouveaux rituels collectifs.
Plutôt que de rejeter le télétravail, au risque de se mettre à dos collaborateurs et candidats, les employeurs ont tout intérêt à le réinventer, en renforçant les atouts à la fois du distanciel et du présentiel.