Index d’égalité professionnelle : un levier à renforcer
Depuis 2019, les entreprises de 50 salariés et plus doivent publier, le 1er mars de chaque année, leurs résultats en matière d’égalité de traitement entre femmes et hommes. Plusieurs critères entrent en compte, comme les écarts de rémunération, les augmentations individuelles ou les promotions. Si cet index reste critiqué et devrait prochainement être révisé, des organisations montrent l’exemple en faisant de l’égalité un pilier de leur politique RH.
Le 6 novembre 2023, à 11h25, les femmes ont commencé à travailler gratuitement. Cette date symbolique, qui traduit les écarts de rémunération moyens entre les deux sexes, a été l’occasion, pour le collectif Les Glorieuses, de publier les résultats d’une étude sur les inégalités salariales en France. Ses principaux enseignements dressent un constat accablant : 45 % des femmes considèrent avoir déjà été victimes de discrimination salariale, et deux tiers estiment ne pas être rémunérées à la juste mesure de leur travail ; par ailleurs, pour plus de huit Français sur dix, les opportunités professionnelles ne sont pas réparties équitablement entre les hommes et les femmes.
Des données confirmées par les sondages réalisés par Glassdor, qui fournissent des résultats complémentaires sur les effets de la mise en place de l’index d’égalité professionnelle : 47 % des femmes constatent des avancées au sein de leur entreprise pour réduire l’écart de salaire entre les sexes, tandis que trois sur dix jugent que l’égalité des genres s’est améliorée depuis la mise en place de l’index – tandis que près d’une sur deux trouve au contraire que la situation n’a pas changé. Pour Lauren Thomas, économiste France chez Glassdoor, si la mise en place de l’index est « un excellent point de départ, un changement d’attitude s’impose également, tant du côté des employeurs que des employés ».
Les bonnes pratiques des entreprises pionnières
Dans certaines entreprises, les résultats sont à la hauteur des ambitions, avec des notes atteignant 100 /100. Elles se distinguent par une recherche d’égalité professionnelle inscrite dans la durée, comme CNP Assurances qui s’est engagé dès 2005 et a déployé plusieurs accords successifs pour concrétiser les objectifs de parité. Les organisations qui font partie des bons élèves s’assurent également de couvrir tout le spectre (recrutement, formation, promotion, rémunération, etc.) : depuis la rédaction de libellés et contenus des annonces d’emploi sans référence au sexe, jusqu’à l’accompagnement personnalisé des femmes en vue d’une promotion, par du coaching et/ou de la formation, en passant par la sensibilisation des managers au renforcement de la mixité.
En termes d’égalité salariale, plusieurs approches sont possibles : par exemple, la garantie à l’embauche d’un niveau de rémunération équivalent quel que soit le sexe, à formation, compétences et expériences comparables ; l’application de la revalorisation salariale au retour de congé maternité ; ou l’examen annuel du nombre de promotions et des augmentations de rémunération associées à ces promotions. On le voit, les possibilités d’agir concrètement ne manquent pas !
Une révision des indicateurs de l’index à horizon 2026
On aurait donc pu espérer que l’index d’égalité professionnelle devienne une nouvelle boussole des entreprises, les incitant à tâcher de faire toujours plus et mieux pour atteindre l’équité. Or la note moyenne déclarée par les organisations de 88 / 100 en 2023 (+2 points en un an) masque une réalité moins positive. Plusieurs experts et chercheurs critiquent des critères méthodologiques, comme le seuil de tolérance de 5 % d’écart salarial ; ou encore la non-prise en compte de la nature et de l’ampleur des augmentations. Ce manque d’ambition dans les indicateurs inciterait des entreprises à se contenter du minimum : à savoir l’atteinte d’un score de 75 / 100, permettant d’éviter des sanctions.
Ces limites expliquent sans doute l’annonce de la refonte de l’index, notamment pour transposer la directive européenne sur la transparence salariale d’ici le 7 juin 2026. Plusieurs pistes sont à l’étude : mettre en place un outil simple d’auto-évaluation en-dessous de 50 salariés ; ou encore revoir le seuil de tolérance de 5 % pour les écarts de rémunération, ainsi que l’indicateur sur le taux de promotion. « Il est aussi prévu de travailler sur les sanctions et peut-être de créer un fonds avec les pénalités pour développer l’égalité », ajoute Anne-Lise Castell, juriste aux Editions Tissot spécialisées en droit social.
Si le chemin vers l’égalité professionnelle reste pavé de bonnes intentions, il est temps de les concrétiser en se basant sur l’index comme base de travail, afin de pousser davantage les curseurs et d’entrer dans une démarche réellement ambitieuse.