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Dernières évolutions impactant la paie : le décryptage de SD Worx

À l’occasion de la rentrée, Abdelkader Berramdane, responsable de la veille juridique chez SD Worx, revient sur l’actualité du premier semestre 2024 et dessine des perspectives pour les prochains mois. L’occasion, pour l’expert, de pointer plusieurs points de vigilance liés à la réforme de l’acquisition des congés payés pour les salariés en arrêt de travail.

Une réforme d’ampleur, qui intéresse tout autant les responsables paie que les chefs d’entreprise : c’est ainsi qu’Abdelkader Berramdane, juriste expert chez SD Worx, décrit les nouvelles règles d’attribution de congés payés aux salariés en arrêt maladie, désormais au diapason de la réglementation européenne. « La Cour de cassation avait demandé, à plusieurs reprises, aux pouvoirs publics de mettre le droit du travail français en conformité ; jusqu’à présent, les majorités en place avaient ignoré cette recommandation du fait de l’impact financier important pour les entreprises. » 

Désormais actée, cette réforme évite néanmoins la surtransposition, en n’accordant pas davantage que les quatre semaines minimales prévues par la directive de 2003. Ainsi, le salarié en AT (AT, dans notre langage, désigne accident du travail) non professionnel se voit attribuer des droits réduits à 80 %, dans une limite de 25 jours ouvrables de congés (ou 20 jours ouvrés) ; dans le cas d’un arrêt de travail professionnel, la continuité des droits est prévue sans limite de durée. « De nouvelles règles de détermination de l’indemnité à verser au salarié en arrêt de travail sont également prévues, complète Abdelkader Berramdane. Dans le cas d’un arrêt de travail non professionnel, les salaires sont reconstitués dans la limite de 80 % de la rémunération. » 

    Information du salarié de retour d’AT : un casse-tête à résoudre

    Le nouveau cadre légal oblige par ailleurs l’employeur à délivrer de l’information au salarié, à chaque retour d’arrêt de travail. Elle doit porter sur les droits acquis pendant l’absence du collaborateur. Or l’application de la règle se heurte à une difficulté : comment s’assurer, comme le prévoit la loi, de la date de réception de l’information ? Le bulletin de paie n’a pas cette vocation, et ne prévoit pas d’espace dédié à cette information ; les modalités de remise du BP ne permettent pas de garantir la date de réception – à l’exception de la date de dépôt dans le coffre-fort numérique, sachant que toutes les entreprises n’en proposent pas à leurs salariés, et que ces derniers ont la possibilité de s’opposer à la réception numérique du BP. 

    L’envoi postal avec accusé de réception représenterait un coût considérable ; la remise contre signature a été abandonnée par la plupart des entreprises. « Aucune option ne semble échapper à des limites importantes, résume Abdelkader Berramdane. Il reste à espérer que l’application ne sera pas synonyme de sanctions pour l’employeur. »

      Report de CP et rétroactivité : deux sources de complexité pour les responsables paie

      La loi prévoit des modalités de report de CP quand le salarié est dans impossibilité de les prendre du fait d’un arrêt maladie non professionnelle ou d’un AT/MP. Le délai se monte à 15 mois avec, en cas de reprise du travail, un début fixé à la date de remise de l’information (voir point précédent) ; si le salarié est toujours absent, pendant une phase à cheval sur deux périodes d’acquisition, le délai de 15 mois débute au 1er jour de la nouvelle période de référence. « La complexité tient au fait que le décompte est effectué arrêt par arrêt ; chaque nouvel arrêt de travail génère son propre délai de report de 15 mois », souligne le responsable de la veille juridique chez SD Worx, qui mentionne un autre point de vigilance relatif, cette fois, à la rétroactivité des droits. 

      Le texte estime en effet qu’il y a lieu de remonter jusqu’au 1er décembre 2009. Or l’entreprise ne sera pas toujours en mesure de répondre à la requête du salarié ; par exemple, quand un changement d’opérateur de paie empêche l’accès aux données antérieures ; ou quand l’organisation a procédé à l’élimination d’un certain nombre de données dans le cadre du RGPD. « Selon la durée de conservation retenue par l’entreprise, celle-ci pourra rencontrer des difficultés à accéder à une certaine profondeur historique. »

        De nouvelles règles de réduction générale de cotisations patronales

        Pour Abdelkader Berramdane, on a confondu vitesse et précipitation dans la conception du texte : « Il est regrettable que les acteurs de la paie n’aient pas été sollicités, alors qu’ils auraient pu pointer les faiblesses du texte, et donc les sources de complexité et de risque de contentieux ». Face aux incertitudes qui demeurent pour ses clients, SD Worx a donc pris en compte la nouvelle période de référence, au 1er juin 2024, pour attribuer à tout nouvel arrêt de travail le nombre de jours de CP prévus par la loi. « C’est un point de départ, à ce stade il est difficile d’aller plus loin ; l’important était de stabiliser la situation pour la période d’acquisition des CP 2024-2025. »

        Si le premier semestre 2024 a été marqué par cette réforme d’ampleur, Abdelkader Berramdane signale également les nouvelles règles de réduction générale de cotisations patronales (ex-réduction Fillon), qui permet aux employeurs de bénéficier d’une diminution des cotisations patronales collectées par l’Urssaf. Les modalités de ce dispositif ont été précisées par le décret n° 2023-1329 du 29 décembre 2023 ; du fait de la revalorisation du SMIC au 1er janvier 2024, le plafond de rémunérations concernées a lui aussi été modifié. Sachant que d’autres augmentations du SMIC pourraient intervenir au cours de l’année, les responsables paie devront suivre les évolutions de ce calcul.

          Indemnités journalières : une réforme dans les mains de la nouvelle majorité

          Enfin, citons la réforme des indemnités journalières introduite par le décret du 12 avril 2021 relatif au calcul des IJ maladie et maternité. Elle devait entrer en vigueur, pour sa phase finale, en juin, mais du fait des élections législatives, a été annulée. Néanmoins, la question du versement des indemnités journalières tant pour ce qui concerne leur montant que les modalités demeurent d’actualité.

          Aujourd’hui, les trois premiers jours d’arrêt de travail ne sont pas pris en charge par la Sécurité sociale. Dans son dernier rapport annuel, la Cour des Comptes émet certaines pistes d’économie dans les dépenses d’assurance maladie. Ainsi revient au jour l’idée La réforme prévoyait de porter ce délai de carence à sept jours ; les jours 4, 5, 6, 7 auraient été indemnisés par l’employeur pour assurer un maintien de salaire dont les modalités de calcul seraient celles de la Sécurité sociale. 

          Autre piste de réflexion, l’interdiction absolue d’indemnisation du premier jour, par l’employeur comme par la Sécurité sociale. « Quid des effets d’une telle règle sur les contrats collectifs de prévoyance, dont la plupart appliquent le principe du non-délai de carence ? », s’interroge Abdelkader Berramdane. Il reste donc à voir si la nouvelle majorité législative reprendra ces suggestions à son compte et répondra à ces interrogations, pour une mise en œuvre effective telle qu’elle permette aux éditeurs de paie de disposer du temps nécessaire à leur adaptation dans les SIRH.

          Rendez-vous prochainement pour les webinaires 2024-2025 de décryptage de l’actualité règlementaire de la paie, par Abdelkader Berramdane. Et bonne rentrée à toutes et à tous !

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