Activité partielle et Covid-19 : les impacts en paie pour l’employeur
L’exécutif a adopté tout un train de mesures pour accompagner au mieux les entreprises dont l’activité est mise à mal par le Covid-19. Outre le dispositif mis en place pour les salariés contraints de garder leurs enfants, le chômage partiel s’est largement imposé dans les organisations, puisqu’il concerne à ce jour près de 8 millions de salariés dans notre pays. Quels sont concrètement, pour l’employeur, les impacts du chômage partiel en termes de paie ? Focus sur les règles qu’il vous faut appliquer.
Activité partielle : le dispositif étendu en raison de la crise sanitaire
Dans son principe, le chômage partiel prévoit qu’une entreprise en difficulté passagère puisse astreindre ses collaborateurs à une réduction du temps de travail, voire à une interruption en cas de fermeture temporaire de tout ou partie de l’entreprise. Notez que les expressions chômage partiel, chômage technique et activité partielle désignent bien un seul et même dispositif.
Dans le contexte de crise sanitaire inédite que nous vivons, le dispositif de chômage partiel a été étendu afin de maintenir les salariés dans l’emploi et de ne pas les laisser sans revenu. Ont accès au chômage partiel toutes les organisations subissant une réduction du temps de travail hebdomadaire ou contraintes de fermer temporairement, et dans lesquelles il est impossible de pratiquer le télétravail.
Les salariés en CDI et en CDD sont éligibles au dispositif, qu’ils soient en temps plein ou partiel, au forfait heures ou jour. Sont également inclus les salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation.
Avant toute mise en activité partielle, l’employeur est tenu de demander, une autorisation auprès de la Préfecture de son département par le biais de la DIRECCTE (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi), sur un service en ligne dédié. La demande peut être faite postérieurement à la mise en place de l’activité partielle, sous conditions de délai. La consultation du CSE n'est plus nécessaire, le décret ayant supprimé cette disposition. Il devra toutefois être consulté a posteriori, et son avis transmis à l'administration dans les deux mois.
Le délai de réponse de la Préfecture a été raccourci, et une absence de réponse sous 48 heures vaut pour accord.
Les règles à appliquer en paie pour le chômage partiel
Le chômage partiel indemnise les salariés à hauteur de 70% du salaire brut (soit environ 84% du salaire net), cette indemnisation est prise en charge par l’État. Les salariés concernés vont donc voir leurs revenus diminuer, à moins que leurs employeurs (en fonction de l’accord ou de la convention en vigueur dans l’entreprise, ou d’une décision unilatérale) ne décident de leur verser un complément. Le gouvernement a précisé, via le décret du 26 mars, que 100% du chômage partiel allait être pris en charge dans la limite de 4,5 SMIC.
1) Le calcul de l’indemnisation
Concrètement, l’indemnisation est calculée sur la base de la rémunération du mois précédent la mise en place de l’activité partielle, selon la méthode dite du maintien de salaire. Il convient de prendre en compte :
- Le salaire de base
- Les heures supplémentaires et complémentaires exceptionnelles et structurelles,
- Les indemnités de congés payés,
- Les primes à périodicité mensuelle,
ainsi que la part maintien employeur si l’arrêt maladie est assimilé à du temps de travail effectif pour congés payés par convention collective ou accord collectif.
2) Le régime social
En ce qui concerne le régime social s’appliquant à l’indemnité de chômage partiel, celle-ci n'est pas soumise aux "cotisations et contributions de Sécurité sociale", mais se voit assujettie à la CSG et à la CRDS :
- à taux réduit pour la CSG déductible : 3,80% (au lieu de 6,80%)
- à taux de 2,40% pour la CSG non déductible, et de 0,5% pour la CRDS non déductible.
3) Les arrêts maladie
Un salarié placé en chômage partiel peut bénéficier d’un arrêt maladie, hors arrêts pour garde d’enfant ou de personne vulnérables. Dans ce cas, le bénéfice du dispositif de chômage partiel s’interrompt pour le salarié jusqu’à la fin de l’arrêt prescrit. Le salarié perçoit ses indemnités journalières sur base légale, sans délai de carence pour tout arrêt ayant débuté au plus tôt le 24 mars et au plus tard le 23 mai.
L’employeur doit également verser un "complément employeur", qui s’ajuste pour maintenir la rémunération à un niveau équivalent au montant de l’indemnisation de l’activité partielle, soit au moins 70 % du salaire brut (le complément employeur ne peut conduire à verser au salarié un montant plus élevé que celui qu’il toucherait s’il n’était pas en arrêt). Ce complément employeur est soumis aux cotisations et aux contributions sociales de droit commun, comme s’il s’agissait d’une rémunération.
4) La prévoyance
En ce qui concerne la prévoyance, les garanties sont maintenues pour les salariés durant la période d’activité partielle.
5) La prime exceptionnelle pour le pouvoir d’achat
Pour mémoire, la prime exceptionnelle pour le pouvoir d’achat (PEPA) correspond à une gratification de 1000 euros maximum que les entreprises peuvent choisir de verser à leurs salariés. Ouverte aux salariés du secteur privé dont la rémunération ne dépasse pas trois SMIC, elle est totalement exonérée de charges sociales et d’impôt.
L’ordonnance 2020-385 du 1er avril 2020 a apporté plusieurs aménagements :
- la nécessité d’un accord d’intéressement dans l’entreprise est supprimée, et les accords de durée dérogatoire peuvent être conclus jusqu’au 31 août 2020 ;
- la prime peut être versée au plus tard le 31 août 2020 ;
- son montant peut être modulé selon les bénéficiaires en fonction des conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19 ;
En outre, si le montant maximal défiscalisé et exonéré de cotisations et contributions sociales est de 1 000 € dans les entreprises sans accord d’intéressement, il est porté à 2 000 € dans celles qui ont mis un accord en œuvre au plus tard à la date de versement de la prime.
Alors qu’Emmanuel Macron a fixé le 11 mai comme objectif pour le début du déconfinement, des millions de salariés s’apprêtent à connaître le chômage partiel durant au moins quatre semaines encore. Les employeurs doivent s’assurer de leur apporter, durant cette période, la meilleure expérience RH possible. Il est par ailleurs dans l’intérêt de toutes les entreprises ayant recours au dispositif de s’assurer de bien respecter les critères d’accès à celui-ci, le cabinet de Muriel Pénicaud ayant rappelé qu’il « n’est pas compatible avec le télétravail ». En cas de recours illicite au chômage partiel, les employeurs concernés risquent de devoir rembourser l’intégralité des sommes perçues à ce titre, et de ne pouvoir bénéficier durant 5 ans d’aides publiques en matière d’emploi ou de formation professionnelle.